Dans les paroisses

Jeûner et prier

Au mois de février nous allons entrer en carême, période de préparation à la fête de Pâques. Durant quarante jours, l’Église nous propose un temps de pénitence et de conversion. Cette invitation peut se concrétiser de manières diverses, notamment par le jeûne. Pour la huitième année consécutive, les paroisses de Fribourg organisent une semaine de jeûne accompagné. Rencontre avec Geneviève Clément, responsable du groupe.

Qu’est-ce qui vous a donné envie d’expérimenter une semaine de jeûne ?
Il y a deux expressions qui m’habitaient intérieurement. Tout d’abord « jeûner et prier », ensuite « vivre d’amour et d’eau fraîche ». En 2019, je sortais d’une dépression et je m’étais mise à l’écart. Je sentais que j’étais en manque. Je me suis demandé ce que Dieu voulait pour moi. J’ai compris qu’il souhaitait que je le mette à la première place dans ma vie. Alors j’ai davantage prié. Un jour, j’ai trouvé un flyer au fond de l’église qui présentait la semaine de jeûne. Je me suis dit : « Essaie, tu n’as rien à perdre. » Cette semaine est devenue en quelque sorte une continuation de ma prière. J’ai vraiment ressenti une énergie nouvelle.

Cette première expérience du jeûne a-telle été pour vous une découverte ?
Oui, effectivement, j’ai constaté que ce n’était pas si difficile de jeûner. Nous sommes faits pour supporter le jeûne. Il fait partie de notre métabolisme. Il est bienfaisant pour le corps. Il est une thérapie connue dans toutes les civilisations. Notre corps tel que Dieu l’a fait est extraordinaire.
Jeûner nous déplace, nous déloge. Nous nous dépouillons intérieurement. Nous ressentons le manque autrement, mais ce manque est-il vraiment une absence ? La nature ayant horreur du vide, nous nous remplissons d’autre chose. Ça laisse de l’espace pour Dieu. Je trouve cela tellement beau.

Concrètement, si je veux faire une semaine de jeûne, comment cela se passet-il ?
Il est important de se renseigner à l’avance et de se préparer psychologiquement. La soirée d’information est faite pour cela, les personnes peuvent aussi me contacter directement. Nous ne pouvons pas entrer dans le jeûne et en sortir immédiatement. Il faut habituellement trois jours de diminution des aliments et trois jours de reprise progressive de nourriture. Donc, il faut compter pratiquement deux semaines. Durant la période de jeûne, nous ne prenons que des jus de légumes et de fruits, selon une méthode éprouvée, promue par l’Action de Carême.

Comment vivez-vous la semaine ?
Chaque année, ce temps de jeûne se déroule durant la première semaine de Carême, de façon à pouvoir facilement ’en souvenir. Elle débute le soir du premier dimanche de carême par une réunion à 17h pour lancer le groupe. Elle se termine le deuxième dimanche de carême à midi, par un repas festif fait d’une compote de pommes !
Durant la semaine, nous nous retrouvons tous les jours de 12h30 à 13h30, ou de 19h à 20h pour partager notre expérience, une tisane à la main, et prier ensemble.

Tout le monde peut-il jeûner ?
Cette semaine de jeûne est à la portée de tous. Il faut en avoir envie, Dieu nous donnera la force. Il ne faut pas se sentir obligé, mais oser faire la démarche si elle nous interpelle. Dans le temps du carême nous sommes tous appelés à approfondir notre relation à Dieu et aux autres, mais chacun est invité à le vivre différemment.

Spirituellement est-ce que le jeûne vous apporte quelque chose ?
Oui, ce manque nous permet de voir les choses différemment. Par exemple, je comprends mieux la phrase du Notre Père : « Donne-nous notre pain de ce jour. » Le jeûne libère l’esprit et revivifie notre vie spirituelle et notre lien avec le prochain. Accompagner la prière par le jeûne nous incarne. Lorsque les jeûneurs se retrouvent, ils portent les intentions de prière des uns et des autres.

Le jeûne a-t-il aussi une dimension de solidarité ?
Nous vivons le jeûne dans le carême et par conséquent il y a naturellement une volonté de partage. Les jeûneurs sont invités à offrir ce qu’ils ont économisé durant la semaine pour les actions de solidarité de carême. Cette année encore les dons des jeûneurs et des jeûneuses seront versés pour le programme d’aide à la sécurité alimentaire et sociale d’Action de Carême au Burkina Faso, ainsi que pour le programme au Niger engagé par l’EPER pour ancrer des solutions de cohabitations apaisées entre les possesseurs de terres agricoles et les nomades et leurs troupeaux.

Dans toute la Suisse

Durant tout le temps du carême, de telles semaines de jeûne sont proposées en Suisse. Il y a une centaine
de groupes de jeûneurs en Suisse, totalisant environ mille participants. Toute personne en bonne santé peut y prendre part. L’abbé Marie-Joseph Huguenin (pour notre groupe de Fribourg), la responsable romande, Katrin Fabbri, et un médecin se mettent bénévolement au service des jeûneurs pour les accompagner de leurs conseils.

Les groupes de jeûneurs sont répertoriés sur leur site internet.

PROPOS RECUEILLIS PAR VÉRONIQUE BENZ | PHOTOS : ACTION DE CARÊME
L’Essentiel des paroisses du décanat de Fribourg – janvier-février 2024