Dans les paroisses | L'Église dans les médias

Pourquoi pas dans une chapelle ?

Il n’est pas rare que notre secrétaire reçoive des demandes de baptêmes. Cela est réjouissant. Pour que la fête soit une réussite à tout point de vue, on accompagne la demande en émettant le souhait que le baptême puisse se faire dans telle ou telle chapelle. Mais voilà qu’une première désillusion se présente lorsque la secrétaire doit annoncer que l’enfant ne pourra pas être baptisé dans cette chapelle parce qu’on ne peut pas y célébrer de baptême.

Pourquoi donc ce refus ? Est-ce une lubie du curé ? Est-ce pour une raison pratique ?

« Le baptême est un rite d’entrée, dont la conclusion devrait être la première entrée dans la communauté eucharistique. En conséquence, le baptistère devrait être un bâtiment séparé, près de l’entrée de l’église, ou bien situé dans un atrium distinct, conduisant à l’église »

Louis Bouyer, Architecture et liturgie

Le baptême est le premier sacrement de l’initiation chrétienne qui se complète avec la confirmation et qui se termine avec la réception de l’eucharistie (cf. Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 1212). Il est le sacrement qui permet l’entrée dans la communauté chrétienne et de prendre part à la vie de l’Eglise comme membre.

Pendant les premiers siècles du début de l’Eglise, on baptisait dans un édifice proche de l’église ou juxtaposant l’église pour bien signifier que le baptême nous ouvrait les portes de l’accès à l’église afin de prendre place au sein de la communauté qui l’habitait. Cet édifice est le baptistère. L’exemple d’un baptistère séparé se trouve à Rome près de la basilique Saint-Jean de Latran, ou à Florence en face de la cathédrale. L’exemple d’un baptistère situé dans un atrium séparé se trouve à l’Abbaye de Saint-Maurice ou à l’église Saint-Michel à Fribourg.

Ce qu’il faut retenir est que : « Le baptistère (ou fonts baptismaux) est un lieu : c’est là que jaillit la fontaine baptismale ou que la cuve baptismale est établie. Il doit être réservé à la célébration du baptême et bien mis en valeur, car c’est là que les chrétiens renaissent de l’eau et de l’Esprit Saint » (Notes doctrinales et pastorales, rituel du Baptême). Remarquons bien la distinction entre le baptistère (ou fonts baptismaux) comme lieu et la cuve baptismale comme mobilier liturgique.

Au fil des ans, le baptême des adultes par immersion totale dans la piscine baptismale s’est raréfié pour laisser davantage de place au baptême des petits enfants dans une cuve baptismale. Avec l’augmentation de ces baptêmes et la cuve baptismale nécessitant moins d’espace, les baptistères ont été, petit à petit, intégrés à l’intérieur des églises paroissiales dans une chapelle du fond aménagée. Pour se faire une idée on peut se référer à la chapelle de la fontaine baptismale à l’abbaye de Saint-Maurice, on peut aussi voir le baptistère à l’église Saint-Michel à Fribourg ou dans une église plus moderne comme celle du Christ-Roi également à Fribourg

En 1951, le pape Pie XII restaure le Triduum pascal et, en 1958, il établit la Semaine sainte. En remettant à l’honneur ces jours saints, le Pape fait de la Vigile de Pâques la célébration la plus importante de toutes les célébrations liturgiques. Il ne s’agit pas d’une messe, mais bien d’une vigile, c’est-à-dire d’une veillée au cours de laquelle est célébrée l’eucharistie. Un aspect très important de cette liturgie fut de mettre en évidence l’importance du baptême des adultes afin de vivifier l’élan missionnaire. Mais la mise en pratique n’était pas évidente. Fallait-il revenir aux piscines baptismales où l’adulte était complètement immergé et, pour ce faire, construire de nouveaux baptistères ? Fallait-il déplacer la cuve baptismale de sorte à mettre le rite en avant et à la vue du plus grand nombre de fidèles ?

L’option prise n’est pas difficile à deviner au vu de la configuration actuelle de nos églises. En déplaçant les cuves baptismales dans le chœur des églises ou devant sur les côtés, on a pris le risque de ne plus voir le baptistère comme lieu. Ainsi, on en est venu à mettre sous la même réalité le baptistère et la cuve baptismale, si bien qu’il est plus difficile maintenant de distinguer les deux. Or, liturgiquement, on distingue toujours le baptistère comme le lieu où se trouve la cuve baptismale.

Ce lieu est nécessairement lié à l’église car, par le baptême, on entre dans la famille de Dieu, on intègre la communauté des croyants. Le baptême, bien que trop souvent célébré dans le cercle restreint de la famille et des amis, n’en demeure pas moins le sacrement qui nous introduit dans l’Eglise de Dieu et qui, par conséquent, concerne toute la communauté paroissiale.

C’est pourquoi seules les églises paroissiales possèdent un baptistère, car l’église est en quelque sorte la maison commune des enfants de Dieu qui se rassemblent pour célébrer Dieu. C’est pourquoi : « En dehors du cas de nécessité, (ndlr en cas de danger de mort imminente ou impossibilité de se déplacer) le lieu propre du baptême est une église… » (cf. Code de droit canonique, canon 857 § 1).

Un autre point important dont il faut tenir compte est que chaque église paroissiale ayant un baptistère possède également les registres paroissiaux dans lesquels on inscrit le nom de l’enfant. On fait ainsi référence à la Parole du Seigneur : « Réjouissez-vous parce que vos noms sont inscrits dans les Cieux » (Lc 10, 20). Puisque le baptême donne à l’enfant d’avoir part au Royaume éternel, par le baptême son nom est inscrit dans les cieux. C’est un des sens du registre baptismal. Ce registre est un acte juridique notifiant l’engagement pris par les parents, le parrain et / ou la marraine dans la foi.

Voilà pourquoi on ne baptise pas, sauf en cas de danger de mort ou pour une grave nécessité pastorale, en dehors de nos églises paroissiales.

Je souhaite, cependant, remercier toutes les personnes qui se dévouent bénévolement pour l’entretien des chapelles. Un merci aux personnes qui viennent fleurir telle ou telle chapelle, un merci à ceux et celles qui donnent de leur temps pour assurer les extérieurs. Un merci également aux conseils de paroisse qui sont attentifs à prendre en charge les gros travaux liés à l’usure du temps ou des intempéries. Merci pour les fidèles qui conservent l’objectif premier de la chapelle comme lieu de recueillement et de prière. Que le Seigneur bénisse chacun et chacune.

par l’abbé Joseph Gay, pour L’Essentiel de mars 2022